La résurgence des coups d’Etat en Afrique : voie pour la révolution de l’Afrique ?
La tendance à l’appropriation, manu militari, du pouvoir en Afrique sonne habituellement comme une rengaine fastidieuse d’un continent qui affectionne plus le bellicisme dans son aspiration à la démocratie que la paix et la justice dans sa prise du pouvoir. En ce temps qui est le nôtre, cette épidémie des coups d’Etats nous fait revenir à une séquence sombre de l’histoire de l’Afrique il y a de cela approximativement 43 ans, c’est-à-dire dans les années 1980.
De toute évidence, un coup d’État demeure un moyen illégal voire anticonstitutionnel pour accéder au pouvoir. Cependant, les effets qui en résultent ne permettent toujours de trancher nettement s’ils sont à bannir radicalement ou peuvent mériter une certaine légitimité. Si la majorité des coups d’Etats conduisent à des régimes dictatoriaux, il sied toutefois de reconnaitre que certains Coups d’État ont conduit à des processus démocratiques, mieux, au progrès des pays. Loin de nous l’envie d’en faire l’apologie, ce genre des coups d’Etats se sont avérés salvateurs. Qu’est ce qui est à la base de ces coups d’Etats ? D’abord qu’en est-il de ces trois dernières années ?
Au Mali, nous avons assisté en 2020 à deux coups d’Etat. En effet, le 18 août 2020, le président Ibrahim Boubacar Keïta est renversé par des militaires, un gouvernement de transition est formé en octobre. Cependant, à la surprise de plus d’un, le 24 mai 2021, les militaires arrêtent le président et le Premier Ministre et le colonel Assimi Goïta est investi en juin comme président de transition.
Au Tchad, Le 20 avril 2021, le président tchadien Idriss Déby est tué par l'offensive du nord du Tchad, un groupe militaire rebelle initié par le Front pour le changement et la concorde au Tchad (FACT), mettant fin à 30 ans de règne. Contre toute attente, son fils Mahamat Idriss Deby Itno, âgé de 37 ans devient président par intérim bafouant ainsi sans vergogne la constitution de la République du Tchad qui prévoit qu’à la mort du président, le numéro un de l’Assemblée nationale assure l’intérim jusqu’à l’organisation des élections. Le fils du maréchal est curieusement investi président en présence d’Emmanuel Macron, président Français.
En Guinée on assiste au même scenario, le 5 septembre 2021, le président Alpha Condé est renversé par un coup d'Etat militaire. Le 1ᵉʳ octobre, le colonel Mamady Doumbouya devient président.
Le Soudan du Nord a jeté le pavé dans la mare en s’immortalisant dans le registre de la prise du pouvoir manu militari, alors qu’il était encore en phase de transition politique. En effet, le 25 octobre 2021, des militaires menés par le général Abdel Fattah al-Burhane chassent les dirigeants civils de transition, qui étaient supposés mener le pays vers la démocratie après 30 ans de dictature d'Omar El-Bachir, lui-même destitué en 2019.
Le spectacle s’est répété au pays de Thomas Sankara, où les militaires ont renversé le désormais ancien prédisent Roch Marc Christian Kaboré, le 23 janvier 2022. Après le renversement de Roch Marc Christian Kaboré, par le colonel Damiba , le Burkina Faso a subi son deuxième coup d’État de l’année, quand le capitaine Ibrahim Traoré, âgé de 34 ans s’était résolu de renverser l’ancienne junte du lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba, l’accusant d’être pro-français, mieux , un pion de la France mais aussi à cause de la détérioration de la situation sécuritaire au Burkina Faso occasionnée par les djihadistes.
Au Niger, le 26 juillet 2023, des militaires annoncent avoir renversé le président Mohamed Bazoum. Le général Abdourahamane Tiani devient le nouvel homme fort du pays. La Communauté Économique des États de l'Afrique de l'Ouest connue sous l’acronyme CEDEAO, la France et certains pays de la prétendue « communauté internationale » condamnent le coup d’Etat et la CEDAO, soutenue par la France menace d’intervenir militairement.
Alors que la situation au Niger était à la une, le Gabon nous surprend un matin avec un coup d’Etat. Un groupe d'officiers supérieurs de l'armée gabonaise est apparu à la télévision nationale aux premières heures du mercredi 30 août et a déclaré qu'il avait pris le pouvoir après que l'organisme électoral de l'État a annoncé que le président Ali Bongo, âgé de 64 ans, avait remporté un troisième mandat.
Pour ces coups d’Etats, les avis sont partagés et sont perçus de diverses manières. Cette situation est pour les uns un regressement dans la démocratie et pour d’autres un levier d’une révolution en vue d’une réelle indépendance. D’autres estiment que c’est le début d’une fin avec le monde occidental et l’ouverture à un monde multipolaire. Si quelques-uns de ces coups d’Etats rencontrent les aspirations de la population et paraissent porteurs d’espoirs, d’autres rencontrent une méfiance intraitable. Quel regard face à cette diversité d’opinions ?
Pourquoi cette épidémie des coups d’Etats en Afrique ? Est-ce une aspiration à la souveraineté, à une réelle indépendance pour l’Afrique ? La démocratie est-elle à la base de tous ces coups d’Etats ? La démocratie ne se réduit-elle pas à une question d’élections ? Que faire quand ces modes de désignation des gouvernants est truqué ? Quelles en sont les causes internes ? Les élections truquées ne sont-elles pas à la base de ces coups d’Etats ? Est-ce que la jeunesse actuelle est-elle devenue une génération consciente, ou c’est simplement un conflit des générations ?
En même temps, ne faudrait-il pas souligner que « le rôle de l’armée dans une démocratie est d’assurer la défense du territoire, la protection des institutions et une soumission sans condition à l’autorité politique civile légitime » ? D’où vient-il que ces militaires changent de vocation? Il faut souligner en outre qu’en dehors de putschs, il y a çà et là des coups d'Etat constitutionnels qui piétinent les institutions. Mais la tendance des récents coups d'états qui se soldent par l'alignement derrière un bloc en ce moment de tension entre l’Occident et la Russie donnent à penser. Nonobstant le ras-le-bol des africains dont la situation se dégrade au jour le jour, il sied au moins de se demander : A qui profitent les coups d'état ? La démocratie est-elle un piège pour l’Afrique ? L’Afrique peut-elle se passer de la démocratie en vue de son progrès ? Quel régime peut correspondre aux aspirations de l’Afrique ?
Ainsi, ce désastre politique apparemment devenu un modus operandi en Afrique a des conséquences graves sur la population, plus particulièrement pour les jeunes qui souvent perdent des repères et ne savent plus à quel saint se vouer.
Avec toutes ces questions soulevées en supra, la revue Tam-Tam, organe d’expression des élèves de Boboto aimerait bien relire la situation actuelle de l’Afrique, comme nous le propose le présent numéro en analysant cette question des coups d’Etats qui est d’actualité en Afrique. Pour y arriver, la revue tam-tam exige de ses écrivains une approche pluridisciplinaire, susceptible d’interroger à la fois plusieurs secteurs de la société afin d’identifier les raisons qui expliqueraient le pourquoi des coups d’Etat en Afrique. A vos plumes !
NOTES IMPORTANTES :
La date limite de dépôt des articles est fixée au 20 décembre 2023.
les articles devront être envoyés à l’adresse e-mail ci-après :
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Les articles sont rédigés en français ou en anglais. La revue Tam-Tam reste ouverte à toutes réflexions libres (recensions, poésies, activités du collège, Chronique, etc.) traitant une autre problématique que celle proposée par cet argumentaire. Les auteurs dont les propositions d’articles n’auront pas été agréées ne recevront de la part de la revue tam-tam aucune notification le leur signifiant.
Eviter le plagiat qui est un délit intellectuel.
En vue d’orienter nos recherches dans la rédaction de nos articles, voici quelques ouvrages et articles parmi tant d’autres à explorer :
- S. COULIBAY, coups d’Etat ; légitimation et démocratie en Afrique
- Les "coups d'état" en Afrique de 1960 À 2021. Typologie, causes, conséquences et pistes de sortie durable. Revue : Agora Afrique - Revue congolaise de sciences politiques (RCSP) n°1
- N. BAGAYOKO et Marc-André BOISVERT, Le retour des coups d’Etat en Afrique, Revue Esprit
- Marc-André BOISVERT, Coups d’Etat en Afrique : le retour de l’uniforme en politique. BulettinFrancoPaix, vol.7, n°2, janvier-Février 2022
- B. NDIAYE Les démocraties Ouest-africaines à l’épreuve des coups d’Etat militaires et constitutionnels. BulettinFrancoPaix, vol.7, n°2, janvier-Février 2022
- M. DWYER, Au-delà des coups d’Etat : comprendre les nouveaux modes militaires d’intervention.
- NICOLE BACHARAN, Le Piège. Quand la démocratie perd la tête.
- SIAKA COULIBALY, coups d'Etat : légitimation et démocraties en Afrique.
- AROL KETCHIEMEN, Les Coups d’État Salvateurs en Afrique Broché – 23 octobre 2019.
- ELISA LEWIS, ROMAIN SLITINE, Le coup d'État citoyen. Ces initiatives qui réinventent la démocratie.
- EMMANUEL BUEYA SJ, l’Etat de droit : une rhétorique de légitimation ? In Revue philosophique de Kimwenza, Droit et démocratie : Qu’est-ce qu’un Etat de droit ? n°17, juillet 2023.
- WILLY MOKA SJ, le système de droit et l’instauration d’un Etat démocratique effectif, In Revue philosophique de Kimwenza, Droit et démocratie : Qu’est-ce qu’un Etat de droit ? n°17, juillet 2023.
Comité de rédaction.